dimanche 20 juillet 2025

Pourquoi il est stratégique d’investir dans l’ingénierie tutorale. Plaidoyer pour une priorisation des moyens consacrés à l’accompagnement

La transformation des modalités de formation observée ces vingt dernières années place l’accompagnement des apprenants au centre des préoccupations des organismes. Loin d’être une simple modalité accessoire, le tutorat s’impose aujourd’hui comme « un facteur déterminant de réussite et d’engagement, en particulier dans les dispositifs à distance ou hybrides ». Pourtant, l’ingénierie tutorale reste souvent le parent pauvre des budgets alloués à la formation. Il est aujourd’hui impératif de renverser cette tendance.

La structuration d’une offre tutorale : un levier pédagogique majeur

L’ingénierie tutorale recouvre, je le rappelle, « l’ensemble des activités de conception qui permettent de définir, de dimensionner et d’organiser le dispositif d’aide, de support et d’accompagnement aux apprenants ». Ainsi, ce n’est pas seulement la présence d’un tuteur qui compte, mais le caractère intentionnel et structuré de l’offre tutorale.

Cette ingénierie permet une analyse précise des besoins d’aide des apprenants, qui ne sauraient être réduits à des généralités. « La réussite d’un dispositif dépend précisément de la capacité à anticiper les besoins de soutien, à identifier les points de fragilité et à organiser des réponses adéquates ». Il s’agit donc de penser, dès la conception, les modalités d’intervention, la fréquence, les outils et les compétences attendues des tuteurs. Cette démarche s’inscrit dans l’exigence d’une individualisation et d’une personnalisation de l’accompagnement. Là où l’individualisation offre de la modularité, « la personnalisation, rendue possible par la relation tutorale, répond aux singularités de chaque apprenant ».

Des impacts économiques immédiats et à long terme

Allouer un budget spécifique à l’ingénierie tutorale se révèle aussi pertinent sur le plan économique. Loin d’alourdir les charges, il s’agit d’un levier de rentabilité, de différenciation et de pérennisation de l’offre de formation. Comme je le souligne souvent : « Un dispositif doté d’une ingénierie tutorale explicite présente une valeur ajoutée tangible, visible et facilement communicable auprès des clients, qu’ils soient financeurs, entreprises ou apprenants. »

La démarche génère non seulement plus d’engagement — et donc de réussite et de fidélisation — mais ouvre la porte à la commercialisation de nouveaux services, dans une logique de montée en gamme. « Le retour sur investissement de l’ingénierie tutorale s’observe à travers la réduction du taux d’abandon et l’optimisation des coûts d’accompagnement, grâce à une allocation raisonnée des ressources. » En d’autres termes, l’investissement initial se traduit par des gains durables : économies de gestion, niveau de satisfaction plus élevé, taux de réinscription en hausse.

Se doter d’un avantage concurrentiel durable

Aujourd’hui, la concurrence dans le secteur de la formation est rude. Les organismes qui se distinguent sont ceux capables de proposer une expérience d’apprentissage à la fois efficace, humaine et personnalisée. « Articuler ingénierie pédagogique et ingénierie tutorale, c’est sortir d’une logique linéaire pour proposer des dispositifs évolutifs, dans lesquels les apprenants se sentent accompagnés du début à la fin de leur parcours. » Cette approche autorise la prise en compte des évolutions technologiques, mais aussi des attentes croissantes, en matière de suivi et de relation personnalisée, exprimées par les apprenants.

Agir par conviction et responsabilité

Considérer l’ingénierie tutorale comme un élément central, et non accessoire, revient à reconnaître que la réussite d’une formation repose principalement sur la qualité et la continuité de l’accompagnement proposé à chaque apprenant. Ainsi, l’efficacité des dispositifs de formation se construit d’abord grâce à une organisation méthodique, réfléchie et assumée du tutorat, plutôt que par le simple concours des circonstances.

Il appartient donc aux responsables de formation de réévaluer la ventilation de leurs budgets et de donner à l’ingénierie tutorale la place qu’elle mérite : celle d’un investissement stratégique, garant de la qualité, de la rentabilité et de la durabilité de leur offre de formation.

L’avenir des organismes performants s’écrit avec l’accompagnement, dès la conception des dispositifs. 


Texte généré par Perplexity à partir de ces prompts

Prompt 1 : en t'appuyant sur les publications de Jacques Rodet, rédige un article destiné à engager les organismes de formation à consacrer du budget à l'ingénierie tutorale. Utilises des citations. Développe un argumentaire convaincant tant sur le plan pédagogique que économique. Utilise un ton scientifique mais accessible et engageant. article de 2500 caractères

Prompt 2 : Il faut que la longueur du texte soit le double. Rédige comme si tu étais Jacques Rodet

Prompt 3 : Reformule le premier paragraphe de la conclusion qui est confus



vendredi 11 juillet 2025

Le tutorat à distance assuré par les assistants pédagogiques IA : une bonne idée ou une représentation tronquée du tutorat à distance ?










Propositions d’alternatives où humains et IA travaillent ensemble

Depuis le milieu des années 2010, les chatbots sont utilisés dans le digital Learning, l’expérience d’Ashok Goel de Georgia Institute of Technology à partir de 2016 en est un bon exemple. Déjà à cette époque, le site humanoides.fr  intitulait un de ses articles : « Et si votre tuteur scolaire était en réalité… un robot ! »

Je m’en étais fait l’écho dans un billet du Blog de t@d dans lequel j’avais analysé les interventions tutorales qui étaient dévolues à cet assistant pédagogique IA (cf. https://blogdetad.blogspot.com/2016/10/quelle-place-pour-les-robots-dans-le.html) qui se terminait ainsi : « Les robots et l'intelligence artificielle sont donc encore loin de pouvoir préempter les fonctions d'accompagnement des apprenants d'un digital learning. Le recours à des tuteurs humains apparaît encore indispensable pour répondre à l'ensemble des besoins de soutien des apprenants. »

Presque 10 ans plus tard, les choses ont-elles changé ?

Il est certain que le développement rapide de l’IA générative a popularisé le recours aux algorithmes pour réaliser de nombreuses tâches. Parmi elles, les interventions centrées sur l’accompagnement des apprenants sont désormais bien identifiées : informer sur le dispositif de formation et les modalités pratiques, annoncer les dates d’examens et de rendus de devoirs, envoi de rappels d’échéances, fournir des réponses immédiates aux questions fréquentes sur les contenus ou les consignes, apporter des explications complémentaires ou des ressources adaptées, présenter des méthodologies appropriées pour l’apprentissage, proposer des activités ou exercices adaptés au niveau et à la progression, produire des rétroactions formatives sur les travaux remis.

Ceci renforce la tentation de certains, qui depuis toujours ont souhaité faire l’économie de l’humain au sein du processus de formation (cf. le e-learning du début des années 2000), et qui aujourd’hui n’hésitent plus à affirmer que les médiations nécessaires entre le contenu de la formation et l’apprenant peuvent être complètement prises en charge par l’IA.

Au-delà des aspects marketing de ces dires, élément à ne pas négliger dans le paysage commercial incertain de l’IA générative (des acteurs de plus en plus nombreux pour un gâteau qui ne s’agrandit pas ou peu et dont les modèles économiques sont peu établis), ils traduisent davantage une méconnaissance des différentes dimensions du support à l’apprentissage qui est réduit au seul plan cognitif. Or, tous les pédagogues, enseignants, formateurs et tuteurs le savent, les besoins de soutien des apprenants ne se limitent pas aux connaissances notionnelles et méthodologiques mais relèvent également des plans motivationnel, socio-affectif et métacognitif.

En la matière, si des progrès ont été enregistrés par l’IA générative, elle reste incapable de solutionner à elle seule des cas complexes d’accompagnement tels que le mauvais fonctionnement d’un groupe collaboratif d’apprenants, la nécessité de réaliser un entretien qualitatif sur les motivations d’un apprenant proche de l’abandon, la prise de recul réflexive permettant à l’apprenant d’identifier les stratégies d’apprentissage qui sont efficaces pour lui, etc.

J’écrivais « à elle seule », ce qui signifie que dans certains cas, les tuteurs humains peuvent utiliser avec profit l’IA générative pour assurer un accompagnement plus abouti. J’ai donné des pistes dès 2020 dans un billet du blog de t@d de ce que peut être une cobotique tutorale, c’est-à-dire un partage des interventions tutorales entre l’IA et les humains (cf. https://blogdetad.blogspot.com/2020/04/pistes-pour-une-cobotique-tutorale.html). Outre ces pistes, j’ai posé également quelques principes dont celui qui consiste à ce que la décision de l’intervention tutorale, après diagnostic effectué par l’IA ou avec l’IA, reste l’apanage du tuteur humain, et ceci en dépit des promesses des éditeurs de LLM et des agents capables de traiter de manière autonome un certain nombre d’actions. Accompagner, c’est établir et entretenir une relation entre humains, empreinte de confiance. Comment faire confiance à une IA pour réaliser des interventions à portée humaine alors que l’on sait qu’elle génère régulièrement des hallucinations ?

Il n’en reste pas moins que sur le plan cognitif, les avantages des assistants pédagogiques IA sont indéniables. Disponibles en permanence, ils sont pertinents lorsque les données d’entraînement ont été judicieusement choisies par l’équipe pédagogique. Le temps gagné pour les tuteurs humains est manifeste et précieux.

Mais justement, que faire de ce temps et de cette valeur créée ?

Là encore, la tentation d’engranger le bénéfice et de supprimer les interventions humaines devenues superflues est grande. Le tutorat à distance ayant la (fausse) réputation d’être coûteux (combien coûtent les abandons ?), l’IA crée l’opportunité pour les institutions de se dégager rapidement de leurs responsabilités dans la réussite des apprenants et de la définition d’une véritable politique tutorale déclinée au sein d’une ingénierie tutorale.

Pour ma part, j’ose espérer que ce temps gagné, cette économie réalisée, soient réinvestis pour poursuivre de plus nombreux objectifs tutoraux (cf. matrice des OTG in « Pratiques du tutorat à distance. Livret d’interventions »

https://sites.google.com/site/pratiquesdetutoratadistance).

Trop fréquemment les institutions, pour faire face à leurs contraintes, sont dans le meilleur des cas,  obligées d’arbitrer entre les besoins de soutien des apprenants en ne retenant qu’un nombre réduit d’objectifs tutoraux à poursuivre, et dans le pire des cas, renoncent à tout dispositif d’accompagnement prétextant un coût insupportable. Celles qui relèvent du second cas, traduisent ainsi une méconnaissance profonde de la nature et des périmètres du tutorat à distance ainsi que de ses coûts réels, n’ayant pas fait l’effort de la quantification des interventions tutorales et de la réflexion sur leur modèle économique. Il s’avère qu’investir dans le tutorat à distance est presque toujours une bonne affaire, y-compris financièrement, que ce soit directement ou indirectement par le renforcement de l’image de marque. Quant à celles qui sont dans le premier cas, l’utilisation de l’IA peut significativement améliorer leur dispositif tutoral en choisissant de poursuivre un plus grand nombre d’objectifs tutoraux.

En définitive, l’intégration croissante de l’intelligence artificielle dans le domaine du digital learning ouvre des opportunités inédites pour enrichir et diversifier les modalités d’accompagnement des apprenants. Toutefois, il est essentiel de garder à l’esprit que l’IA, aussi performante soit-elle sur le plan cognitif, ne saurait remplacer la dimension humaine, irremplaçable dans la gestion des aspects motivationnels, affectifs et métacognitifs. L’avenir du tutorat à distance réside donc dans une complémentarité intelligente, où l’IA agit en soutien des tuteurs humains, libérant du temps pour des interventions plus personnalisées et qualitatives. Cette collaboration cobotique tutorale, doit être pensée et mise en œuvre avec rigueur, en plaçant toujours la relation de confiance et la réussite des apprenants au cœur des priorités. À terme, les institutions qui sauront investir dans cette synergie innovante renforceront non seulement la qualité de leurs dispositifs, mais aussi leur capacité à accompagner efficacement la diversité des besoins et des parcours d’apprentissage.


Texte rédigé avec l’aide de l’outil Perplexity pour la reformulation et la conclusion. Image générée avec ideogram.ai


samedi 21 janvier 2023

Parution du n°16 de Tutorales

 

Ce numéro de tutorales est un patchwork, assemblage de différents textes que j’ai déjà publiés sur le Blog de t@d ou sur mon site professionnel de 2020, année de parution du n°15 de tutorales, à ce jour. 
Si plusieurs textes, comme les deux premiers, sont dans l’esprit initial de cette revue puisqu’ils traitent exclusivement du tutorat à distance, à travers la lecture critique de la nouvelle compétence « Tutorer les apprenants à distance » ajoutée au REAC du titre de Formateur Professionnel d’Adultes et les usages que les tuteurs à distance peuvent avoir de Chat GPT, d’autres s’éloignent un peu de ce thème central. 

Deux autres caractéristiques de ces textes sont, d’une part, que j’en suis le seul auteur, d’où le surtitre patchwork et non varia, et d’autre part, qu’ils expriment mes points de vue sur différents sujets dans une écriture libre qui ne correspond pas aux standards habituels des revues. Ceci les rend donc éligibles à la publication dans Tutorales qui a toujours eu le souci de ne pas enfermer les auteurs dans les carcans de l’édition traditionnelle. 

Ainsi, plusieurs sujets d’actualité, parfois déjà ancienne, comme l’individualisation, d’autres issus de la période pandémique telle que la comodalité, l’incontournable « engagement des apprenants », mais aussi des intangibles comme l’intelligence collective, ou encore l’innovation, les feuilles de présence, côtoient deux autres textes se voulant plus de fond sur l’articulation de l’ingénierie de formation et l’ingénierie pédagogique des organismes de formation multisites d’une part, et comment associer le bricolage imposé aux tuteurs à distance, parfois revendiqué, et l’ingénierie tutorale qui est de la pleine responsabilité des organismes de formation. 

Je vous en souhaite une agréable lecture.

vendredi 13 janvier 2023

Chat GPT, un outil d'aide pour les tuteurs à distance ?














Introduction

Il est bien difficile d’échapper à l’actualité que Chat GPT a suscitée. Néanmoins, pour ceux qui aurait besoin d’en savoir davantage sur ce que permet Chat GPT, voici ce qu’il dit de lui-même : « ChatGPT est un modèle de traitement automatique du langage développé par OpenAI. Il utilise des techniques d'apprentissage automatique pour comprendre le contexte et générer des réponses écrites en langage naturel. ChatGPT est basé sur la technologie GPT (Generative Pre-training Transformer), qui a été pré-entraînée sur un grand corpus de textes pour comprendre le langage naturel. Il est capable de générer des textes de haute qualité, de répondre à des questions, de traduire des textes, de synthétiser de la parole et de faire d'autres tâches liées au traitement automatique du langage. Il est utilisé pour de nombreux scénarios tels que la création de contenu, la réponse automatique aux clients, la génération de dialogue, la traduction automatique, etc. »

Depuis sa mise à disposition, gratuite, mais pour combien de temps, de très nombreuses personnes ont testé son utilisation en fonction de leurs centres d’intérêt. Les enseignants et les formateurs ont été nombreux à s’inquiéter du fait que Chat GPT pourrait faire le travail à la place des étudiants et apprenants. Notons simplement, que si c’est le cas, ces derniers n’auront rien appris mais pourront éventuellement valider leur cursus. Ceci pose donc la question des formes d’évaluation pensées par les concepteurs pédagogiques. Il est certain que les quiz de connaissance, qui sont trop fréquemment utilisés en formation à distance, risquent de ne plus évaluer grand-chose. Il appartient donc aux concepteurs d’imaginer des activités d’évaluation qui ne soient pas uniquement centrées sur les connaissances mais bien sur leur utilisation en situation.

Je me propose, ici, de tester la capacité de Chat GPT à assurer un tutorat à distance des apprenants. Pour ce faire, j’ai repris, en les anonymisant, des messages que des apprenants m’ont envoyés en demandant à Chat GPT d’y répondre.


Quand Chat GPT formule des réponses à des messages d’apprenants

Message 1

Tout d'abord, je vous souhaite une excellente année 2021 ... qu'elle soit moins confinée que ne le fût 2020 !

Je me permets d'envoyer ce mail pour signaler que je ne serai peut-être pas des vôtres ce soir pour la CV, je n'ai plus de réseau tel depuis mercredi dernier et ce normalement jusqu'à mercredi prochain. Je travaille en partage avec mon tel mais d'expérience, le soir le partage fonctionne mal.

Donc, au cas où mon partage me lâche, je voulais m'en excuser par avance.

Mon groupe vous tiendra au courant sûrement, on avance sur le livrable.

Une soixantaine de questionnaires à étudier, des entretiens retranscris à valoriser, du travail nous attend mais on a les ingrédients pour avancer.

Je vous dis à tout à l'heure peut-être.

Réponse de Chat GPT

Je comprends votre situation et je vous souhaite une bonne résolution de votre problème de réseau. Je vous remercie de nous avoir informés à l'avance de votre éventuelle absence ce soir et je suis heureux d'entendre que votre groupe avance sur le livrable. N'hésitez pas à nous tenir informés de votre situation et de l'avancée de votre groupe. Je vous souhaite une bonne journée et une bonne chance pour vos études.

Commentaire

La réponse de Chat GPT est intéressante, toutefois l’utilisation du vouvoiement n’est pas adaptée à la relation qui s’était établie entre cet apprenant et moi, tuteur à distance. La formule « bonne chance pour vos études » n’est pas très heureuse car la chance n’influe que bien peu dans les apprentissages. Encourager l’apprenant à poursuivre ses efforts d’apprentissage serait plus adapté.

 

Message 2

Suite à tes CV, la lecture du blog de tad ainsi que certaines revues de tad, nous avons pu identifier les 8 briques constituant les actions de l'ingénierie tutorale (voir tableau ci-dessous).

Nous avons notamment utilisé ces points pour récolter les données convoquées et constituer les questionnaires quantitatifs/qualitatifs.

Nous souhaitons intégrer cette approche dans notre "mémoire" . Devons-nous la présenter dans la partie "méthodologie" et/ou dans la partie "analyse"?

Réponse Chat GPT

Il est approprié de présenter l'approche de l'ingénierie tutorale dans la partie "méthodologie" de votre mémoire, car c'est là que vous décrivez comment vous avez collecté et analysé les données pour votre étude. Il est important de décrire les briques de l'ingénierie tutorale que vous avez utilisées pour récolter les données et constituer les questionnaires quantitatifs et qualitatifs. Il est également utile de justifier pourquoi vous avez choisi cette approche en expliquant les avantages qu'elle offre par rapport à d'autres approches.

Il est également possible d'intégrer cette approche dans la partie "analyse" de votre mémoire pour montrer comment vous avez utilisé ces briques pour interpréter vos résultats et en tirer des conclusions. Il est important de maintenir une certaine cohérence dans la présentation de l'approche utilisée tout au long de votre mémoire.

Commentaire

Bien évidemment, Chat GPT n’a pas une idée très précise de l’ingénierie tutorale et sa réponse sur le plan méthodologique laisse donc à désirer. Toutefois, en formulant deux possibilités, toutes les deux réalistes, il réussit à produire une réponse qui amène l’apprenant à s’interroger sur l’utilisation des modèles proposés en cours.


Message 3

Je fais partie du groupe 1E sur le scénario tutoral. Durant la CV vous avez évoqué le fait qu'il fallait produire le conducteur des CV. Je souhaitais savoir si nous avions la même vision du conducteur de CV.

Pour moi, il regroupe les étapes et les actions menées par le formateur et les apprenants durant la CV avec le timing et les outils utilisés. Je dirai que c'est le déroulé de la séance lorsque je fais du présentiel.

Si je suis sur la bonne voie, faut-il rajouter l'objectif pédagogique lié à l'activité menée. 

Si je ne suis pas sur la bonne voie, pouvez-vous m'expliquer ce qu'est un conducteur de CV ?

Réponse Chat GPT

Vous êtes sur la bonne voie en définissant un conducteur de CV comme regroupant les étapes et les actions menées par le formateur et les apprenants durant la CV avec le timing et les outils utilisés.

Il est également important d'inclure l'objectif pédagogique lié à l'activité menée dans le conducteur de CV. Cela permet de s'assurer que l'activité est alignée sur les objectifs d'apprentissage et que les outils et les étapes choisis sont appropriés pour atteindre ces objectifs.

En général, un conducteur de cours est un document qui décrit les différents éléments de la séance de cours, comme le plan de cours, les objectifs d'apprentissage, les activités et les outils utilisés, les rôles et les responsabilités des formateurs et des apprenants, le temps alloué à chaque activité, les moyens d'évaluation, etc. Il est destiné à aider les formateurs à planifier et à organiser efficacement les cours, et à assurer la qualité de l'enseignement.

Commentaire

La réponse est de bonne qualité et redonne des éléments d’information sur l’ingénierie pédagogique qui sont valides pour la production d’un conducteur de classe virtuelle.

 

Message 4

Visiblement il y a un problème dans les CV

Je suis convoqué ce soir en tant que membre du groupe 2 alors que je suis dans le groupe 1 ... prévu pour demain soir.

Et je pense que je ne suis pas le seul.

Réponse Chat GPT

Il semble y avoir une confusion concernant les horaires des séances de groupe. Il est important de clarifier les dates et les heures de chaque séance pour éviter ce genre de confusion. Il serait utile de vérifier auprès du responsable du projet ou du professeur pour s'assurer que vous avez les bonnes informations. Il pourrait être également judicieux d'envoyer un e-mail à l'ensemble des membres de votre groupe pour les informer de la situation et s'assurer que tout le monde est au courant de la bonne date et heure.

Commentaire

La réponse est générale et ne permet pas de répondre précisément à l’apprenant qui veut savoir à quelle CV il doit participer. Par contre, le conseil d’envoi d’un mail à ses pairs, un message sur forum aurait été plus adapté, est pertinent et peut rappeler au tuteur à distance de le faire.

 

Message 5

Pour notre travail d'ingénierie tutorale, nous allons mener des entretiens à distance à partir de demain pour interroger les acteurs de la formation dont nous allons mettre en place le système tutoral.

Dans ce cadre, nous aimerions partager un PowerPoint avec les questions écrites pour guider notre entretien. Afin d'officialiser ce support auprès de notre interlocuteur et d'en indiquer visuellement le contexte, serait-il possible de récupérer un PowerPoint vierge avec la charte du Master ?

Dans le cas contraire, pourriez-vous nous informer assez rapidement de cette impossibilité ?

Merci pour votre aide et à très bientôt,

Réponse Chat GPT

Il est possible de récupérer un PowerPoint vierge avec la charte du Master pour utiliser comme support pour vos entretiens à distance. Il est conseillé de vous adresser à la personne responsable de la communication ou de la charte graphique de votre Master pour obtenir un modèle de PowerPoint conforme à la charte graphique. Il est également possible de demander de l'aide à l'équipe pédagogique pour vous orienter vers la personne compétente.

Il est important de noter que, pour des raisons de confidentialité, il est nécessaire d'obtenir l'accord écrit des personnes interviewées avant de partager tout enregistrement de l'entretien ou de tout document transcrit.

Je vous souhaite bonne chance pour vos entretiens. N'hésitez pas à me contacter si vous avez besoin d'aide supplémentaire.

Commentaire

L’affirmation du premier paragraphe est erronée car dans ce master il n’y avait pas de Powerpoint charté. De plus, la suggestion de demander de l’aide à l’équipe pédagogique est malvenu puisque c’est ce qu’a fait l’apprenant en contactant son tuteur. Par contre le rappel de la confidentialité est intéressant bien qu’il puisse être superflu. Il permet néanmoins au tuteur de vérifier s’il a bien formulé ce point dans l’énoncé de l’activité.

 

Message 6

Je voulais vous informer que je suis atteinte du covid depuis presque 4 semaines. Les symptômes ont progressivement été éloquents, grosses fièvres notamment pendant les cours et se sont estompés pour laisser une déficience ventilatoire en apport d'Oxygène.

Je suis sous oxygénothérapie à domicile et cela a un impact sur mon apprentissage. En effet, je me rends compte que je ne peux fournir un travail intellectuel d'apprentissage que pendant une heure d'affilée. Puis il faut que je me repose. Cela me permet au mieux 3h de travail par jour puisque je suis arrêtée depuis début novembre jusqu'au 6 décembre. Et donc que je n'ai pas de charge de travail autre que le master pour le moment.

Je ne me sens pas particulièrement en retard. Car je m'accroche.

Je suis aussi très intéressée par l'ingénierie tutorale et je pense que je serai dans le rythme pour notre regroupement. Je suis juste frustrée par ma fatigabilité intellectuelle en lien avec mes problèmes respiratoires.

Je voulais vous informer de cette période pour moi difficile. Mais je reste confiante dans mes capacités.

Réponse Chat GPT

Je suis désolé d'entendre que vous êtes atteinte de la COVID-19 et que cela a un impact sur votre apprentissage. Il est important de prendre soin de votre santé et de suivre les conseils de votre médecin en matière de repos et de traitement.

Il est également important de communiquer avec les responsables de votre formation pour discuter des options de flexibilité pour votre apprentissage en fonction de votre situation de santé. Il peut y avoir des délais pour les travaux ou des moyens de soutien pour vous aider à gérer votre charge de travail.

Il est également important de ne pas vous mettre trop de pression pour suivre le rythme des autres étudiants et de ne pas vous frustrer. Il est important de se donner les moyens de progresser à son propre rythme.

Je vous souhaite un bon rétablissement et n'hésitez pas à me contacter si vous avez besoin d'aide supplémentaire.

Commentaire

La réponse a une dimension empathique non personnalisée mais correspond à ce que ferait de nombreux tuteurs. Là encore, Chat GPT n’a pas compris que le destinataire du message de l’apprenant était le tuteur. Ceci a été provoqué par la formulation de la requête qui était « répondre à ce message ». Le résultat est meilleur lorsque la requête est « Réponse du tuteur de l'apprenant qui a envoyé ce message ».

 

Message 7

Nous sommes en difficulté dans notre groupe.

Comme je l'ai fait remarquer hier, nous avons pris beaucoup de retard dans ce projet car nous avons choisi le terrain de Nadia et que les données convoquées sont arrivées vers le 19-20 décembre par son intermédiaire. Nous n'avons pas un accès direct aux intervenants ( ou bien nous ne nous le permettons pas) ce qui crée une subordination au rythme et décisions de Nadia.  Le travail de collaboration est difficile avec elle. Elle n'était pas disponible pendant les vacances de Noel. En revanche il est aisé entre Audrey et moi. Nous avons besoin d'une médiation de votre part.

Comment pouvons-nous procéder?

Réponse Chat GPT

Il est important de discuter des difficultés rencontrées au sein du groupe avec un tiers impartial, comme un responsable de projet ou un médiateur. Il est également important de communiquer clairement les attentes et les besoins de chacun, ainsi que de chercher des solutions pour améliorer la collaboration et la communication au sein du groupe. Il peut également être utile de discuter de la répartition des tâches et des responsabilités, pour s'assurer que chacun comprend sa contribution au projet et que les attentes sont claires. Il peut également être judicieux de discuter de la disponibilité de chacun et de trouver des solutions pour travailler ensemble malgré les absences.

Commentaire

La réponse est d’ordre général et non pragmatique. Toutefois, elle peut aider le tuteur à préparer la rencontre avec le groupe afin de surmonter le conflit.

 

Que tirer de ces exemples

La première chose est à la charge du tuteur qui utilise Chat GPT, il doit être précis dans la formulation de ses requêtes afin que Chat GPT situe son rôle de tuteur.

Il est évident que les réponses fournies par Chat GPT sont d’ordre général et ne peuvent pas tenir compte du contexte ni de l’historique de la relation tutorale.

Les formules destinées à créer du lien et la construction de la confiance entre le tuteur et le tutoré sont absentes. De même, à quelques exceptions, pour les mentions rappelant la disponibilité du tuteur et les formules de politesse.

Les réponses sur le plan méthodologique sont simples mais correctes. Celles formulées par un tuteur humain pouvant être plus complètes et étayées.

L’usage des temps conditionnel et subjectif, si utiles aux tuteurs, est inexistant.

Les réponses sont affirmatives et la technique du questionnement ouvert n’est pas utilisée par Chat GPT.



Finalement, est-ce que Chat GPT est utile pour les tuteurs devant réaliser des interventions auprès des apprenants ?

Ma réponse est affirmative, sous réserve que le tuteur ne se limite pas à faire un copier-coller des réponses de Chat GPT. Il devrait davantage s’en servir pour identifier la structure de sa réponse et repérer des éléments dans le message de l’apprenant qu’une lecture rapide et une analyse insuffisante lui ferait négliger. Chat GPT n’est donc pas une baguette magique mais constitue un outil que les tuteurs à distance peuvent mobiliser pour être en mesure de réaliser des interventions plus qualitatives en n’oubliant de recontextualiser, d’utiliser les techniques de rédaction propres au soutien à l’apprentissage, et de manifester une empathie sincère et non de convenance. 

dimanche 8 janvier 2023

Lecture critique de la compétence "Tutorer les apprenants à distance" dans le REAC Formateur Professionnel d'Adultes

 INTRODUCTION

En 2003, la toute récente communauté de pratiques des tuteurs à distance, t@d, que j’avais initiée s’était fixée plusieurs objectifs dont celui d’œuvrer à la reconnaissance du métier de tuteur à distance. Quelques années plus tard, constatant que sur le terrain, les fonctions tutorales étaient investies par des enseignants ou des formateurs et que le métier de tuteur à distance n’émergeait pas, cet objectif a été abandonné. Certes, des organisations actuelles entièrement dédiées à la formation à distance ont des personnels dédiés à l’accompagnement des apprenants mais, comme Viviane Glikman, il faut bien constater que les critères qui fondent l’existence d’un métier, ne sont pas manifestes (formation initiale, code déontologique, convention collective, organisations corporatives ou syndicales…)[1]

Aujourd’hui, ce principe de réalité est consacré, enfin pourrions-nous dire, par le millésime 07 du REAC FPA paru le 21 décembre 2022 qui introduit, la compétence « Tutorer les apprenants à distance ». Je me propose dans ce billet d’en faire une lecture critique.

La fiche compétence est structurée en 4 rubriques :

  • Description de la compétence – processus de mise en œuvre

  • Contexte(s) professionnel(s) de mise en œuvre

  • Critères de performance

  • Savoir-faire techniques, savoir-faire organisationnels, savoir-faire relationnels, savoirs


Lien du téléchargement du REAC FPA. la fiche de la compétence tutorer les apprenants à distance est aux pages 35 et 36.


DESCRIPTION DE LA COMPETENCE - PROCESSUS DE MISE EN OEUVRE 

Description de la compétence

Cette partie commence par évoquer deux notions, le scénario tutoral et la charte tutorale, qui ne sont pas forcément connues par tout un chacun. Pour mémoire, le livrable « scénario tutoral » de l’ingénierie tutorale [2] nécessite les actions suivantes : Positionner les interventions tutorales sur le scénario pédagogique, Décrire et quantifier les interventions tutorales, Rédiger la charte tutorale indiquant les droits et devoirs des tuteurs et des apprenants.

Il est à noter que la production du scénario tutoral est à réaliser par l’équipe de conception de la formation à distance concernée, que cette action se situe en amont de l’animation de la formation et le plus souvent avant le recrutement du formateur-tuteur. Toutefois, un formateur peut être tout à la fois concepteur, formateur et tuteur et dans ce cas, il lui appartient de produire le scénario tutoral avant le début de l’animation de la formation.

La production d’un scénario tutoral nécessite la production préalable du scénario pédagogique détaillé qui liste l’ensemble des activités d’apports, d’apprentissage et d’évaluation. Chacune de ces activités peut faire l’objet d’interventions tutorales dites conjoncturelles, car leur existence est reliée à celle de ces activités. D’autres interventions tutorales, dites structurelles, sont également à intégrer dans le scénario tutoral. Il s’agit d’interventions qui ponctuent les grandes étapes de la formation, qui sont présentes dans la plupart des formations et donc transposables de l’une à l’autre. [3]

Bien évidemment, le scénario tutoral, tout comme la charte tutorale ne peuvent être produits sans le cadrage de l’organisme de formation. Celui-ci devrait avoir définir sa politique tutorale, ne serait-ce que pour choisir les objectifs tutoraux qu’il souhaite poursuivre et les fiches de fonctions des différents profils de tuteurs à distance. De manière plus précise, l’analyse des besoins de soutien du public visés mais aussi leur priorisation sont des éléments que l’organisme de formation devrait fournir à ceux qui vont concevoir le scénario tutoral. L’ensemble de ces actions se situent dans le livrable « Système tutoral » de l’ingénierie tutorale.

La charte tutorale est un document générique de l’organisme de formation qui a vocation à s’appliquer à l’ensemble des formations qu’il propose. Elle permet à l’organisme de formation de décrire sa stratégie tutorale, les valeurs qui la sous-tendent, le système tutoral qu'elle a adopté, l'identification des profils de tuteurs, les modalités d'interventions tutorales. Elle permet également de préciser les droits et devoirs des différents acteurs, tuteurs et apprenants, tant les uns envers les autres qu'en direction de l'institution.

Le texte du REAC indique également que « les besoins des apprenants et des spécificités de la formation à distance » doivent également être pris en compte lors de l’élaboration du scénario tutoral. Si les besoins de soutien des apprenants à distance sont bien décrits dans la littérature, ils restent génériques et non contextualisés à une formation et un public en particulier. Pour ce faire, l’organisme de formation devrait procéder à un inventaire des besoins de soutien des apprenants tant de leur point de vie que de celui de l’équipe pédagogique et de sa hiérarchie. L’expérience montre que les représentations des besoins de soutien des apprenants qu’ont ces différents acteurs ne sont pas identiques. Certains considèrent que ces besoins sont uniquement d’ordre cognitif, d’autres indiquent que des besoins de soutien relèvent du plan socio-affectif et du plan motivationnel, et, croyez-moi, je n'ai jamais rencontré un apprenant réclamant du soutien métacognitif bien que celui-ci puisse l’aider à apprendre à apprendre et à exercer son autonomie d’apprenant.

L’inventaire des besoins de soutien des apprenants, et non des attentes qui sont davantage de l’ordre du confort, peut être réalisé par voie de questionnaires et/ou d’entretiens semi-directifs. Le plus fréquemment, il apparait que la liste des besoins de soutien des apprenants à traiter se révèle bien plus grande que ce que l’organisme de formation peut supporter tant en termes d’organisation que budgétairement. Il appartient donc à l’organisme de formation de prioriser les besoins de soutien inventoriés en les rapprochant des objectifs tutoraux retenus dans sa politique tutorale et d’autres méthodes de priorisation pouvant être mobilisées. [4]

Comme nous venons de le voir, les tuteurs à distance, pour pouvoir réaliser leurs interventions, ont besoin de s’appuyer sur le scénario tutoral, la charte tutorale mais également l’étude des besoins de soutien des apprenants, documents pour lesquels ils ne sont pas forcément impliqués dans le processus de leur production, et qui relèvent avant tout de la responsabilité de l’organisme de formation et des concepteurs pédagogiques.


Processus de mise en œuvre

Toujours dans cette première rubrique du REAC, sont identifiées des champs d’actions des tuteurs à distance que je numérote à des fins de repérage dans ce texte :

  1. Mettre en œuvre un tutorat à distance proactif et réactif,

  2. Faciliter l'utilisation de l’environnement d’apprentissage en ligne et à distance,

  3. Formuler des consignes, des propositions et des rétroactions,

  4. Mettre à disposition des ressources complémentaires, afin de permettre aux apprenants de s’approprier et d’adapter leur parcours de formation à distance, de favoriser les apprentissages et de limiter le taux d’abandon.

  5. En tenant compte de la dynamique de groupe et des difficultés individuelles, animer et modérer les échanges sur des outils de communication collaboratifs afin d’initier et d’entretenir une communauté apprenante à distance.

  6. Tracer les interventions tutorales réalisées dans un outil numérique pour rendre compte du suivi et de la progression des apprenants et favoriser la collaboration entre les intervenants.

Champ d’actions 1

Il est heureux, qu’après les nombreux débats du début des années 2000 sur la primauté de la réactivité ou de la proactivité en matière de tutorat à distance, que les deux soient retenus dans le REAC. [5]

Champ d’actions 2

Il est directement relié à l’OTG 15 (Objectif Tutoral Générique) « Aider à maîtriser l’environnement d’apprentissage » positionné au croisement de la fonction tutorale technique et du plan de support à l’apprentissage cognitif. [6]

Champ d’actions 3

Il est à remarquer que la plupart des consignes d’activités relèvent davantage de l’ingénierie pédagogique que de l’action tutorale. Toutefois, les tuteurs à distance auront fréquemment à compléter ces consignes lorsqu’elles ne se suffisent pas à elles-mêmes, à les reformuler en les complétant par des conseils et propositions de réalisation. La production de rétroaction est certainement l’action pédagogique de très haute valeur que peuvent avoir les tuteurs à distance. Elle est particulièrement indispensable à réaliser sur les travaux produits par les apprenants afin de permettre à ceux-ci de situer leurs apprentissages et de trouver dans les rétroactions des occasions de les poursuivre. [7]

Champ d’actions 4

Les ressources complémentaires que les tuteurs peuvent indiquer aux apprenants viennent soit en complément du contenu de la formation soit en réponse à des intérêts des apprenants pour approfondir tel ou tel point. Il est certain que plus le tutorat est personnalisé, plus le tuteur aura à réaliser ce type d’intervention. Rappelons tout de même que le tutorat à distance n’est pas par nature personnalisé et qu’il existe plusieurs types de tutorat à distance : tutorat de groupe, tutorat individualisé de sous-groupes et tutorat personnalisé. Le choix entre ces différents types tient tout autant à la politique de l’organisme de formation, qu’au format de la formation et aux caractéristiques des publics visés. [8]

Il est curieux que l’objectif tutoral premier « Lutter contre l’abandon » soit associé à ce champ d’actions dans la mesure où c’est l’ensemble des interventions tutorales qui contribuent, de part leur dimension motivationnelle, à favoriser la persévérance des apprenants. Il n’est pas non plus judicieux de lier la lutte contre l’abandon à la seule fourniture de ressources complémentaires, ce qui tendrait à penser que l’abandon a d’abord des causes cognitives. Comme l’a brillamment démontré Clément Dussarps [9] dans sa thèse, les causes de l’abandon sont multiples et celles qui sont d’ordre socio-affectifs doivent faire l’objet d’une attention particulière. Il est donc regrettable que « Lutter contre l’abandon » ne soit pas positionné comme un champ d’actions à part entière dans le REAC.

Champ d’actions 5

Si les tuteurs doivent intervenir pour permettre l’émergence chez les apprenants d’un sentiment d’appartenance au groupe et que la connaissance de l’évolution des groupes restreints leur est utile, il apparaît que la création et l’animation d’une communauté apprenante est bien ambitieuse pour les formations de courte durée tant ce type de communauté nécessite du temps pour exister et qu’elle n’aura l’approbation des apprenants que dans le mesure où ils trouvent un intérêt personnel à leur participation.

Champ d’actions 6

Il est essentiel pour les tuteurs à distance de garder la mémoire des interventions tutorales qu’ils réalisent envers le groupe d’apprenants, les sous-groupes et chacun des apprenants. Si cela permet de répondre à des exigences administratives, le premier intérêt pour les tuteurs est la capitalisation de ses interventions qui lui permet d’une session à l’autre d’une même formation de s’acquitter plus rapidement de son travail. Un autre intérêt est de lui permettre également de comptabiliser son temps de travail, et donc d’être en mesure non seulement de le justifier mais d’en donner à voir la réalité. En effet, il arrive encore trop souvent que les organismes de formation ajoutent la ligne « tutorer à distance » à la fiche des fonctions des formateurs sans forcément identifier le temps et les moyens nécessaires à la poursuite des objectifs tutoraux. [10]

Il est également à noter, que la plupart des LMS, n’offrant que peu d’outils dédiés aux tuteurs à distance, il appartient à l’organisme de formation de fournir les outils numériques permettant de garder la trace des activités des tuteurs à distance.

Contexte(s) professionnel(s) de mise en œuvre

La temporalité indiquée dans cette rubrique est discutable. En effet, les actions en amont de la formation tout comme celles en aval ne peuvent être de la responsabilité des tuteurs à distance que dans la mesure où ils ont une situation contractuelle avec l’organisme de formation qui le permet. Les formateurs, non-salariés permanents d’un organisme de formation qui sont en charge du tutorat à distance, ce qui est un cas fréquent, sont sollicités uniquement pour le « pendant » la formation. A noter aussi que dans des formations longues, où plusieurs formateurs interviennent, ceux-ci investissent les fonctions tutorales uniquement lors des parties de la formation dont ils sont en charge. Par définition, ils ne peuvent intervenir en amont.

Si le REAC indique que le tutorat à distance peut s’exercer en équipe, il aurait donc été pertinent de préciser les différents profils de tuteurs à distance qui peuvent collaborer que ceux-ci soient internes ou externes à l’organisme de formation.[11]

 

CRITERES DE PERFORMANCE

Le REAC identifie 5 critères de performance à partir desquels il appartient aux organismes de formation, et non aux tuteurs à distance, de concevoir un dispositif d’évaluation. Ceci est intéressant d’autant plus que la littérature sur le tutorat à distance traite trop peu de l’évaluation du tutorat. Les critères sont les suivants :

1.      Les interventions tutorales sont adaptées aux besoins des apprenants et à la situation

2.      Les interventions tutorales favorisent l’autonomisation de l’apprenant à distance

3.      Le scénario tutoral et les moyens envisagés sont respectés, les éventuelles modifications sont motivées

4.      Les outils de communication collaboratifs sont animés et modérés

5.      Les interventions tutorales sont tracées dans un outil de suivi

Critère 1

Ce critère ne dépend pas directement des tuteurs à distance mais de l’organisme de formation et des concepteurs qui ont réalisé les actions permettant d’identifier la politique tutorale de l’organisme de formation, les besoins de soutien des apprenants, le scénario tutoral, la charte tutorale.

Critère 2

Ce critère tend à indiquer que l’autonomisation des apprenants à distance est un objectif tutoral à retenir par les organismes de formation. Pour l’atteindre, des interventions tutorales investissant le plan cognitif-méthodologique et le plan métacognitif sont donc à prévoir au scénario tutoral. Là encore, il existe une limite à sa réalisation pour des formations de courte durée tant le développement de l’exercice de son autonomie par l’apprenant est un processus demandant du temps.[12]

Critère 3

Ce critère a le grand mérite d’exiger l’existence du scénario tutoral. Il indique aussi un certain nombre d’exigences pour l’organisme de formation en matière de fourniture d’outils de suivi de leurs actions par les tuteurs à distance.

Critères 4

Un outil de communication collaboratif est d’abord un outil de communication. Notons que les interventions tutorales sont toujours des actions de communication et que celles-ci ne sont pas toujours collaboratives, qu’au contraire, certaines nécessitent la confidentialité. Il faut également remarquer que toutes les formations à distance n’ont pas vocation à être collaboratives et que certains apprenants choisissent cette modalité car ils veulent ne pas avoir à s’engager dans un groupe d’apprenants. La collaboration, à ne pas confondre avec la coopération [13], nécessite effectivement des espaces de communication mais également de nombreuses interventions tutorales qui ne se limitent pas à l’animation et la modération de ces espaces. C’est en particulier le cas, lorsque des médiations et des actions de résolution de conflit entre membres d’un groupe collaboratif sont à réaliser par les tuteurs à distance.

Il semble là que le REAC traduit certains tropismes en faveur de la collaboration et de certains outils communs tels que les forums des LMS.

Critère 5

Le respect de ce critère impose qu’un outil de conservation des traces des interventions tutorales soit disponible chez l’organisme de formation. A noter, que les fonctions des LMS, ne permettent qu’un traçage quantitatif et non qualitatif.

 

SAVOIR-FAIRE TECHNIQUES, SAVOIR-FAIRE ORGANISATIONNELS, SAVOIR-FAIRE RELATIONNELS, SAVOIRS 

Le REAC liste 41 items dans cette rubrique. Ils sont d’abord utiles aux organismes de formation pour dimensionner leur politique tutorale et l’organisation de leur dispositif tutoral. Bien évidemment, ils permettent aux tuteurs à distance de faire le point sur leurs pratiques tutorales et de repérer les axes de progression qui sont les leurs. Plus fondamentalement, ils peuvent servir à la conception de formation permettant aux formateurs traditionnels de devenir tuteur à distance. Notons qu’un formateur ayant développé ces savoirs est davantage qualifié qu’un formateur traditionnel et que les organismes de formation devraient en tenir compte pour déterminer sa rémunération.

L’intérêt ce cette liste réside principalement dans le fait que l’exercice du tutorat à distance ne demande pas la seule adaptation des formateurs aux outils numériques mais que des items tels que « pratiquer l’écoute active », « utiliser les règles de communication bienveillante » concerne le savoir-être du tuteur à distance. [14]

Ces items, à mon sens, ne sont pas à considérer comme cumulatifs et ne peuvent trouver des traductions concrètes dans chaque formation. En effet, cela dépend de la politique tutorale de l’organisme de formation, des formations visées et de leurs durées, des publics concernés, des outils utilisés.

Certains biais des auteurs sont discutables. Par exemple, « la connaissance des principaux enseignements des neurosciences » n’est pas propre à l’exercice du tutorat à distance, pour peu que ces apports en soient de réels. Cet item aurait tout aussi bien, avec profit selon moi, être remplace par un autre concernant la connaissance des pédagogues et des courants pédagogiques qui n’ont pas attendu les neurosciences pour établir de nombreuses réalités que ces dernières redécouvrent.

 

CONCLUSION

La première chose à faire est de se féliciter de l’apparition de cette de fiche de compétence professionnelle dans le REAC FPA. Tutorer les apprenants à distance est effectivement nécessaire pour que les formations à distance soient de qualité. Il est dommage que cela intervienne plus d’un quart de siècle après le développement du e-learning mais ne faisons pas la fine bouche, et ce n’est pas moi qui la ferai tant j’ai consacré d’efforts à mieux faire reconnaitre le tutorat à distance et que je mesure précisément le chemin parcouru. Réjouissons-nous de ce nouveau pas dans la bonne direction.

Reconnaissons aussi que l’exercice n’était pas forcément facile et que cela explique certaines imperfections. La plus importante, à mes yeux, est certainement relative au fait que cette fiche de compétence ne puisse avoir une dimension systémique puisqu’inscrite dans un REAC. Comme indiqué dans mes commentaires, les organismes de formation tout comme les concepteurs de formation ont un rôle non négligeable dans la définition, la conception, la préparation à la diffusion et l’évaluation des services tutoraux offerts aux apprenants à distance. L’activité des tuteurs à distance ne peut être entièrement penser en l’extrayant du cadre plus large de l’ingénierie tutorale.

Les critères de performance indiqués sont certes intéressants mais ne sont pas les seuls qui pourraient être retenus. Pour que ceux-ci soient pleinement opérationnels, l’identification d’indicateurs et d’observables pour chacun d’eux mériterait d’être pris en compte dans une prochaine version.

La liste des savoirs mériteraient également d’être revue en faisant une plus large part aux connaissances en sciences de l’éducation mais aussi de manière très opérationnelle en pointant d’autres savoir essentiels aux tuteurs à distance. Par exemple, le fait qu’un tuteur à distance agira fréquemment par écrit, alors que la compétence essentielle d’un formateur en présentiel est son oralité, amène à constater que certains formateurs présentiels ont besoin de monter en compétences pour s’exprimer avec précision et empathie à l’écrit.

Ce REAC offre une occasion de combler un manque cruel qui est l’inexistence en France d’un parcours universitaire de tuteur à distance. Gageons que sa publication, le développement toujours croissant de la formation à distance, la disponibilité d’experts du tutorat à distance inspireront certaines de nos universités qui après avoir développé de nombreux masters, licences professionnelles et diplômes universitaires de chefs de projets de formation à distance pourraient faire de même pour la professionnalisation des formateurs sur le tutorat à distance.


NOTES


[1] Glikman, Viviane. Peut-on parler du "métier" de tuteur à distance ? Conférence dans le cadre des 10 ans de t@d - Séminaire international en ligne sur le tutorat à distance du 1er oct. au 12 déc. 2013. https://youtu.be/HGa_6TNmd7A


[2] Présentation courte de l’ingénierie tutorale : https://sites.google.com/view/jrodetconseil/outils/ing%C3%A9nierie-tutorale

Rodet, Jacques. L'ingénierie tutorale. Définir, concevoir, diffuser et évaluer les services d'accompagnement des apprenants d'un digital learning. JIP Editions. 2016 https://sites.google.com/site/ingenierietutorale/


[3] Rodet, Jacques (2013). Interventions tutorales structurelles et conjoncturelles https://blogdetad.blogspot.com/2013/04/interventions-tutorales-structurelles.html


[4] Rodet, Jacques (2014). Prioriser les besoins de soutien des apprenants à distance pour déterminer ceux qui doivent faire l'objet de réponses tutorales https://blogdetad.blogspot.com/2014/10/prioriser-les-besoins-de-soutien-des.html


[5] Rodet, Jacques (2009). Choisir entre ou associer les interventions tutorales proactives et réactives https://blogdetad.blogspot.com/2009/09/choisir-entre-ou-associer-les.html

Rodet, Jacques (2008). Le tuteur à distance en quête d'équilibre. https://blogdetad.blogspot.com/2008/05/le-tuteur-distance-en-qute-dquilibre.html


[6] Sur la matrice des OTG, cf. Rodet, Jacques. Pratiques du tutorat à distance. Livret d'interventions. JIP Editions. 2020 https://sites.google.com/site/pratiquesdetutoratadistance


[7] Rodet, Jacques (2000). La rétroaction, support d'apprentissage ? Revue DistanceS, CQFD, Québec, 2000 https://edutice.archives-ouvertes.fr/edutice-00000482/document


Rodet, Jacques (2009). La rétroaction aux travaux des étudiants : regard métacognitif sur mes pratiques https://blogdetad.blogspot.com/2009/11/la-retroaction-aux-travaux-des.html


[8] Rodet, Jacques (2021). Trois types de tutorat à distance https://blogdetad.blogspot.com/2021/04/trois-types-de-tutorat-distance.html


[9] Rodet, Jacques (2015). Thèse de Clément Dussarps sur la dimension socio-affective et l'abandon en FOAD. https://blogdetad.blogspot.com/2015/01/these-de-clement-dussarps-sur-la.html


[10] Sur la comptabilisation du temps de travail des tuteurs à distance, cf. l’enquête de t@d qui avait montré que l’immense majorité des organisations qui faisaient appel à des tuteurs à distance ne comptabilisaient pas leur temps de travail, donc ne le reconnaissait pas et ne le rémunérait pas non plus.

Rodet, Jacques, Allavoine Corinne, Santiago Anne-Valérie, Valette Thierry (2012). Résultats d’enquête sur la comptabilisation du temps de travail des tuteurs à distance. Revue Tutorale, n°10 http://jacques.rodet.free.fr/tutoral10.pdf


[11] Rodet, Jacques (2015). Profils de tuteurs à distance. https://blogdetad.blogspot.com/2015/08/profils-de-tuteurs-distance.html


[12] Rodet, Jacques (2019). Mot minute Autonomie. https://youtu.be/wlwe083WlhQ


[13] Rodet, Jacques (2020). Mot minute Coopération https://youtu.be/GiUF8LremYU

Rodet, Jacques (2020). Mot minute Collaboration https://youtu.be/rIgr1jI4LTY


[14] Rodet, Jacques (2016). Le savoir-être du tuteur à distance. https://blogdetad.blogspot.com/2016/04/le-savoir-etre-du-tuteur-distance.html